LOVE
(2003)Love est un cheval de Troie, ou peut-être bien cette fois un âne. Dans une scénographie abstraite aussi séduisante que rassurante, une série de saynètes s’enchaînent selon une dramaturgie minimale, structurée selon une sérialité rigoureuse. Jusqu’ici, on se sent bien, en bonne compagnie. Mais la danse qui s’y donne à voir, charrie des motifs refoulés de la modernité chorégraphique : expressivité, figuration… Chaque scène constitue une sorte de tableau vivant, construit une image qui s’effrite aussitôt, laissant un temps croire à la constitution d’un récit et ne laissant aucune prise à l’élaboration d’une signification ou d’une quelconque logique de commentaire. Dès lors, le malaise s’installe d’être confronté à cette figuration régressive, proche du mime, de s’avouer étrangement familier de ces images quasi-archétypales qui ne donnent pas de signes d’intelligence, et interdisent toute connivence. L’harmonie compositionnelle se révèle alors un leurre, et attire le spectateur au-delà de sa volonté de comprendre, pour le confronter à une succession d’altérités surgissant dans un présent perpétuel.
François Piron