/ CONSUL ET MESHIE -
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CONSUL ET MESHIE

(2018)

Un projet conçu et interprété par Antonia Baehr et Latifa Laâbissi
dans une installation visuelle de Nadia Lauro

Les singes, tout au moins les grands singes, comptent parmi les animaux « presque humains ». Ce « presque » a fait d’eux une surface de projection pour ce qui est considéré comme humain par les humains. Au début du XXe siècle, les chimpanzés Consul et Meshie vivaient comme des humains, chez les humains, et avaient fini par se considérer eux-mêmes comme tels. Antonia Baehr et Latifa Laâbissi revêtent leurs identités simiesques, sans garantir l’historiquement correct. Fortement poilues et libres de mœurs, impertinentes et impudiques, ces deux guenons humaines occupent une installation visuelle de Nadia Lauro qui se niche dans les musées et les théâtres, à l’écart de la scène, dans un coin tranquille. Avec « Consul Baehr » et « Meshie Laâbissi » sur leurs deux sièges de voiture en cuir, dont les entrailles velues se déversent petit à petit dans l’espace, le public est convié à participer à une aventure où le temps se dépose durant 3h30.

L’être humain est un singe pour l’être humain. Ou : deux humains jouent aux singes, qui jouent aux humains pour les humains. Elles perdent le contrôle et le reprennent en se dressant mutuellement. Elles font l’apprentissage zélé de savoir-faire et de savoir-pas-faire. Elles dorment et tombent dans l’apathie, elles font exploser en vol des mots d’ordre déclamés par les discours populistes. Elles cannibalisent des poses, des danses iconiques, brodent des slogans. Consul et Meshie représentent des figures hybridées qui interrogent la violence des assignations et foutent le bordel dans les catégories nature / culture, homme / femme, le soi et l’autre.

INSTALLATION VISUELLE
L’installation de Nadia Lauro prend la forme d’une œuvre autonome dans laquelle Consul et Meshie séjournent pendant la durée de la performance, se l’approprient, peut-être même la détruisent. Grâce à elle, elles se nichent dans les espaces institutionnels changeants des théâtres et musées.

“Nous occuperons l’espace entre les œuvres exposées ou des coins oubliés et à l’écart. Il nous importe que ce ne soit pas un lieu de passage. Rester avec nous pour passer du temps ensemble doit être une décision. Le public s’en va quand il veut et arrive quand il veut.”

L’installation et ses deux habitant(e)s se transplantent dans l’environnement existant par un geste d’occupation, ce qui génère une situation plutôt intime, pour environ 30 à 50 spectateurs·trices.

“Nous imaginons que l’installation ne remplisse pas la pièce entière, mais occupe plutôt ‘un coin’ à partir duquel, comme Nadia Lauro a pu le dire dans nos discussions, elle déchire une ouverture dans l’espace.”

Le camp de base pour Consul et Meshie s’apparente à un intérieur de limousine, matelassé, couleur bronze qui habite, comme zone marginale de l’espace, un coin. Les parties rembourrées sont pourvues de fermetures à glissière surdimensionnées dont, si on les ouvre, surgissent des pièces de fourrure, agrandissant au gré de l’usage la surface du terrain de jeu. Un étrange véhicule vaisseau entre promesse miroitante et transgression de l’usage. La scène a quelque chose en commun avec la situation / couverture à pique-nique du Déjeuner sur l’herbe de Edouard Manet, mais sans la verdure. À quoi ressemblerait-il avec de grands singes comme protagonistes ? Les spectateurs(trices) font partie de ce paysage, assis, allongés près du véhicule.

“Je m’appuierai sur ‘mon’ gibbon de la peinture de Zötl et je travaillerai avec une barbe longue, qui encadrera tout le visage. Le costume (tout comme celui de Latifa) dénude les seins – ainsi la barbe pourrait aussi être utilisée comme ‘travestissement masculin’, si le singe humanoïde, incarné par un humain, performe un humain mâle.”

PRESSE